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TÉMOIGNAGE D'ERNEST GOURDON

Nous sommes arrivés sur le continent Antarctique depuis à peine une semaine et il semble déjà que l’endroit affecte notre moral, tout est si blanc et froid, le soleil ne descend jamais vers l’horizon. La cabane qui nous sert de refuge est plutôt bien équipée malgré tout, le poêle fonctionne à longueur de journée et il y a toujours du thé chaud pour nous réchauffer. Les lits sont plutôt inconfortables mais on sent à peine le bois sous toutes les couches de vêtements que nous devons porter pour ne pas souffrir d’engelure. Nous faisons même dormir les chiens avec nous lorsque le vent souffle très fort. J’imagine mal comment nous allons survivre à l’hiver qui s’en vient inlassablement. Nous n’avons pas beaucoup de moyens de communication avec la civilisation et même notre radio semble prendre des vacances, la réception est très mauvaise et nous n’arrivons pas toujours à capter les messages de nos collègues américains, quoique ceux-ci sont plutôt rafraichissants et change de la routine qui s’installe tranquillement. Les premiers jours ont été utilisés afin de s’approprier l’endroit et s’habituer à survivre dans des conditions aussi extrêmes.  Nous avons fait peu ou pas d’expérience scientifique.

 

Notre équipe devait se rendre au sommet du Mont Erebus sur l’île de Ross afin d’y prendre des échantillons et pour y faire un abri semi-permanent, puisque la majorité de nos recherches devait s’y dérouler. La formation géologique avait l’allure d’un volcan éteint et tout dans les études sismiques précédentes nous laissait croire que la formation était éteinte depuis très longtemps, mais l’absence de glace en son centre nous indiquait le contraire. Les échantillons de roches prélevées aux abords du camp nous indiquaient également qu’il ne s’agissait pas de roche volcanique, chose assez inusité étant donné la proximité de la formation rocheuse. Bref plein de mystère que nous allions tenter de résoudre avec les moyens de fortune dont nous disposions.

 

 Le traineau à chien était surchargé par le poids des matériaux nécessaire à la construction et les chiens, mené par Kelvin, notre plus fidèle chien de traineau, peinaient à avancer dans la neige glacée. Nous devions marcher à côté pour ne pas ajouter du poids, mais le traineau marquait déjà des signes de faiblesse. Évidemment quelques temps plus tard, le traineau de chien a finalement émis son dernier souffle, nous étions à 3 h de notre destination et à 6 heures de notre point de départ, alors nous n’avions pas le choix de continuer à pied et espérer que notre équipement radio fonctionnerait mieux lorsque nous prendrions de l’altitude et que nous pourrions avoir une équipe de support qui viendrait nous chercher. Nous avons laissé la majorité de l’équipement à la merci des intempéries et avons pris le strict nécessaire pour survivre et nous faire un abri temporaire, le temps que le second traineau arrive avec les pièces de rechange.

 

 Alors plutôt que de laisser le froid mordant de la plaine nous transpercer, nous avons marché vers la falaise avoisinante dans l’espoir que le vent soit un peu plus clément. Donc soudain, alors que nous longions la paroi rocheuse, nous avons aperçu une ouverture à peine plus haute et large qu’un homme. Une sorte de faille dans la montagne pourtant si impressionnante. À l’approche de cette cavité dans la montagne, les chiens commençaient à être nerveux, ou plutôt excité à l’idée de ne plus être à la merci de cet hostile continent. Il commençait à faire très froid et l’heure avançait alors nous devions penser à nous arrêter pour dormir, alors nous avons eu l’idée d’entrer dans la grotte pour voir si nous pouvions y faire un bivouac et nous réchauffer un petit peu. La caverne était tortueuse, mais devenait de plus en plus grande au fur et à mesure que nous nous enfoncions dans les entrailles de la montagne. Finalement nous avons découvert une grotte d’une dimension respectable pour pouvoir y dormir couché, avec suffisamment de place pour y monter un campement et y faire un feu. Une lueur émanait des murs, probablement une forme de vie qui n’avait pas encore été découverte. Nous en avons pris un petit échantillon alors que Monzimet préparait le campement pour la nuit. La caverne était étrangement confortable, l’air ambiant était presque tiède, une belle différence avec le froid mordant qui régnait à l’extérieur. Aucun autre explorateur n’avait jamais mis les pieds dans cet endroit, ce qui le rendait étrangement attrayant et effrayant à la fois. Le repas a été frugal encore une fois, le porridge et le lard commence à vraiment me tomber sur l’estomac. Malgré le fait que nous mangeons à notre faim, il semble que nous perdons du poids, le froid n’aide sans doute pas. Nous n’avons pas vraiment dormi cette nuit-là. Une sorte de frénésie flottait dans l’air.

 

Le lendemain nous devions commencer l’ascension dès les premières lueurs du jour. Pourtant le destin allait en décider autrement, nous allions devenir la première équipe à révéler un mystère pour toute l’humanité. Au lieu de revenir sur nos pas, nous avons continué à descendre dans les profondeurs de la caverne de pierre et de glace afin de pouvoir en faire un récit détaillé dans nos recherches sur la substance couvrant les parois. Notre avancée était assez fastidieuse puisque le sol de la caverne était loin d’être plat ou régulier, mais nous avancions tout de même d’un bon pas, toujours entouré par la lueur étrange des murs. La paroi semblait étrangement lisse à certain endroit, comme si elle avait été polie par des glaciers vieux de milliers d’années. La pierre elle-même avait une consistance et une constitution étrange pour une montagne, encore plus pour un volcan. Si je n’avais pas un sens de la réalité très développer, j’aurais dit que cette montagne avait été monté de toute pièce, agencer pour que le tout ait l’air naturel, presque trop. Mes connaissances en géologie était mise à l’épreuve, j’allais faire la une des journaux scientifiques avec ces découvertes, du moins c’est ce que je pensais avant d’arriver devant la chose la plus incroyable qu’un être humain puisse voir de son vivant.

 

Au bout du tunnel, une légère lueur était discernable, comme un matin couvert de brume. Nous sommes sortis de la caverne pour découvrir une vallée cachée au cœur du continent. Une sensation d’émerveillement a saisi nos cœurs lorsque nous avons compris que nous étions à l’entrée d’une ville immense, entièrement faite de glace et de verre étincelant. Les bâtisses étaient d’un style architectural nouveau et inusité. Aucun humain n’aurait pensé à créer une telle splendeur dans cet endroit. Nous n’étions pas seuls, Dieu ou des êtres d’une grande sagesse avait créé un monde caché dans la montagne, une cité enfouie, caché par des kilomètres de glace. Nous sommes entrés dans le passé silencieusement, abasourdi par l’émerveillement et l’incrédulité devant cette immense découverte. Cette cité était grandiose, si ce n’est que la splendeur du lieu était obscurcie par l’absence de bruit. Les rues désertes, de structures glacées à l’architecture sibylline, tout dans ce lieu était figés dans un éternel blizzard. L’air même avait cette étrange sensation d’absence, de vide. Avions-nous découvert l’Atlantide? En avançant vers ce lieu de mirage, nous avons commencé à apercevoir la trace des habitants de jadis, figé pour l’éternité dans la glace. Un vase rempli de végétation pétrifié, des fleurs inconnues à jamais. Puis une découverte macabre, un cadavre de créature humanoïde, mais non humaine.

 

Nous avons envoyé Monzimet, accompagné de Kelvin, l’un des chiens de traineau, pour avertir les autres de notre découverte incroyable. Malheureusement il ne s’est jamais rendu, son cadavre a été retrouvé éventré, peut-être que le chien est devenu fou. Nous avons récupérer le cadavre et l’avons enterré sous une montagne de pierre, le sol étant gelé en permanence.

 

Nous sommes en fait arrivés dans cet endroit de désolation par pure hasard et notre destin aura été de survivre, du moins j’espère.

 

 

Ernest Gourdon

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